L’indépendance de la justice tunisienne en danger

L’indépendance de la justice tunisienne en danger

La CIJ et Avocats sans-frontières Belgique expriment leur entier soutien au Conseil de l’ordre des avocats tunisiens.

Cet appel intervient alors que le verdict dans l’affaire opposant des avocats tunisiens à leur barreau pour « grève illicite » doit être rendu le 8 juillet 2003, et alors que doit se tenir l’Assemblée générale du barreau le 6 juillet, l’Observatoire pour la protection des défenseurs des droits de l’Homme (programme conjoint de la FIDH et de l’OMCT).

Par son mode d’élection, mais aussi par son attachement à la défense des libertés individuelles et notamment à la lutte contre les violences policières, la pratique de la torture et les dysfonctionnements du système judiciaire, l’ordre des avocats représente l’un des derniers rares remparts contre l’arbitraire en Tunisie.

Pour cette raison même, nombre d’avocats sont l’objet de pressions multiples (filatures, intimidation de leurs clients et de leurs proches, campagnes de diffamation,…) et d’actes de violence sérieux et répétés.

La procédure intentée contre le Barreau par six avocats proches du parti au pouvoir (le RCD) est une étape cruciale dans cette stratégie répressive, dont une des composantes est l’instrumentalisation de la justice pour sanctionner toutes les personnes qui osent prendre position contre le pouvoir.

Les poursuites engagées contre le barreau visent à obtenir l’annulation rétroactive de l’appel à la grève lancé par le Conseil de l’ordre du Barreau le 7 février 2002, pour protester contre les nombreuses irrégularités survenues au cours du procès du chef du Parti communiste ouvrier de Tunisie (PCOT), Hamma Hamami, ainsi que les violences perpétrées contre les observateurs et avocats à cette occasion.

Au terme de plusieurs audiences, auxquelles nos organisations ont mandaté M. Pierre Lyon-Caen, avocat général à la Cour de Cassation de France, en tant qu’observateur (Cf. Compte rendu de missions internationales d’observation judiciaire, Procès contre l’ordre des avocats, Tunisie, mai 2003), le verdict doit être rendu le 8 juillet.

L’enjeu est de taille. Déposséder le Conseil de l’Ordre du pouvoir d’appeler à la grève – droit consacré par la Constitution tunisienne – permettrait ultérieurement de menacer les participants de poursuites disciplinaires et donc de réduire l’ampleur du mouvement et faire sanctionner plus aisément un nombre plus restreint de participants.

Plus généralement, une telle décision priverait les avocats d’une arme essentielle dans leur combat pour une justice transparente et indépendante.

L’Observatoire pour la protection des défenseurs des droits de l’Homme, la Commission internationale de Juristes et Avocats sans-frontières Belgique demandent avec force aux plus hautes autorités tunisiennes de garantir la totale indépendance de la justice tunisienne lors du délibéré.

Ceci afin que les charges retenues contre le Barreau tunisien soient abandonnées, dans la mesure où celles-ci sont arbitraires en ce qu’elles ne visent qu’à sanctionner l’exercice légitime de ses fonctions.

Nos organisations appellent enfin les autorités tunisiennes à cesser tout acte de harcèlement et d’intimidation à l’encontre des avocats et magistrats tunisiens qui luttent pour l’indépendance de la justice et le respect des libertés fondamentales en Tunisie, ainsi que de se conformer aux principes de base relatifs au rôle du Barreau adoptés par le huitième Congrès des Nations unies (1990), et aux dispositions des instruments internationaux relatifs aux droits de l’Homme ratifiés par la Tunisie et de la Déclaration universelle des droits de l’Homme.

Procès contre l’Ordre des avocats

Procès contre l’Ordre des avocats

Le Centre pour l’indépendance des magistrats et des avocats de la CIJ, l’Observatoire pour la protection des défenseurs des droits de l’Homme et Avocats sans frontières (ASF) publient un rapport de missions d’observation judiciaire du procès contre l’ordre des avocats.

Le compte rendu de missions d’observation révèle une fois encore les dysfonctionnements de la justice en Tunisie ainsi que l’écart toujours plus important entre le discours officiel, qui proclame son attachement au respect des droits de l’Homme, et la réalité d’une répression quotidienne de la libre expression dans le pays.

Le droit et le système judiciaire sont souvent utilisés par le pouvoir pour réprimer les opposants de tous bords, celui-ci exerçant une pression constante sur les magistrats pour influer sur les décisions de justice.

En conclusion, il est clair que le procès intenté contre l’Ordre des Avocats n’a pas eu d’autre but que de punir les avocats pour avoir protesté contre le manque d’indépendance de la magistrature et contre des procédures grossièrement inéquitables, qui ôtent toute crédibilité au fonctionnement du système judiciaire tunisien.

Tunisia-trial Bar Association-trial observation report-2003-fra (Texte complet en PDF)

Standards d’indépendance judiciaire: rapport sur la Tunisie

Standards d’indépendance judiciaire: rapport sur la Tunisie

Le Centre pour l’indépendance des magistrats de la CIJ publie aujourd’hui un rapport sur la Tunisie dans lequel il conclut que le gouvernement de Tunisie viole les standards nationaux et internationaux d’indépendance du pouvoir judiciaire.

Le rapport décrit aussi les poursuites judiciaires d’avocats des droits de l’homme, du Conseil de l’Ordre national des avocats et d’organisations non gouvernementales. Plusieurs recommandations sont faites au gouvernement afin d’améliorer la situation actuelle.

Le rapport sert à mettre en lumière certaines situations et à donner une évaluation globale des efforts de la CIJ visant à traiter certains problèmes que connaissent des membres des professions juridiques et des défenseurs des droits de l’homme en Tunisie.

Tunisia-report-fact-finding report-2003-fra (full text in French, PDF)

Cette guerre illicite doit être conduite de façon licite

Cette guerre illicite doit être conduite de façon licite

La CIJ condamne l’invasion illicite de l’Irak en l’absence manifeste d’un mandat du Conseil de sécurité. Cette attaque constitue une nette régression dans l’application du droit international et en ébranle les fondements.

Maintenant que l’attaque armée a été lancée, il est impératif que les Etats prêtent attention à ne pas aggraver la situation par la commission d’autres actions illicites.

Toutes les parties au conflit sont dans l’obligation de respecter les prescriptions de droit humanitaire et les normes de droits de l’homme contenues dans les Conventions de Genève de 1949 et autres instruments internationaux pertinents et dans le droit international coutumier.

Le fait que l’Irak ait été illicitement envahi ne saurait en aucun cas le dédouaner du strict respect du droit international humanitaire et des normes de droits de l’homme.

Les Etats qui ne prennent pas part aux hostilités doivent respecter et bénéficier du droit de la neutralité. Ils ne doivent en particulier pas autoriser que leur territoire soit utilisé à des fins militaires et ne peuvent faire l’objet d’une attaque.

Les Etats belligérants sont dans l’obligation de traiter humainement toute personne en leur pouvoir. Les personnes qui se rendent ne peuvent être attaquées.

Toutes les parties au conflit doivent distinguer les objectifs militaires des populations et biens à caractère civils. Ces derniers ne peuvent être la cible d’une attaque.

La CIJ souhaite souligner que tous les Etats doivent scrupuleusement respecter les règles prohibant ou limitant l’usage de certaines armes. Aucune arme qui cause des souffrances excessivement cruelles ou frappant sans discrimination ne peut être utilisée, même à défaut d’une interdiction conventionnelle spécifique.

La CIJ est particulièrement préoccupée par les informations selon lesquelles certaines parties au conflit envisageraient d’utiliser des agents chimiques. Il est indispensable que les Etats parties à la Convention sur les armes chimiques aient une interprétation stricte de celle-ci.

Par ailleurs, le Protocole de Genève de 1925 et le droit coutumier interdisent de façon absolue le recours aux armes chimiques.

“Nous espérons que ces règles ne seront pas traitées par les Etats participant au conflit aussi cavalièrement qu’ils ont traité la Charte des Nations Unies”, a noté Louise Doswald-Beck, Secrétaire Générale de la CIJ.

La CIJ rappelle l’interdiction absolue de commettre des crimes de guerre et des crimes contre l’humanité. La commission de tels crimes entraîne la responsabilité pénale de leurs auteurs, qu’ils soient chefs d’Etat ou simple soldat.

Tous les Etats sont dans l’obligation de s’assurer que les personnes soupçonnées de tels crimes sont poursuivies. Enfin, les Etats parties au Statut de Rome sur la Cour pénale internationale doivent poursuivent les auteurs de ces infractions ou, à défaut, les remettre à la Cour pénale internationale.

La CIJ déplore l’annonce d’une guerre d’agression contre l’Irak

La CIJ déplore l’annonce d’une guerre d’agression contre l’Irak

La CIJ exprime aujourd’hui sa profonde consternation alors qu’un nombre restreint d’Etats se tiennent prêts à lancer une invasion de l’Irak qui, au regard du droit international, est illicite et constituerait une guerre d’agression.

Les Etats-Unis, le Royaume-Uni et l’Espagne ont notifié leur intention de recourir à la force, et ce, même sans résolution du Conseil de sécurité des Nations Unies. Il n’y a aucune autre base juridique possible à une telle intervention.

En l’absence d’une autorisation du Conseil de sécurité, aucun Etat ne saurait recourir à la force contre un autre Etat, sauf en cas de légitime-défense, en réponse à une attaque armée.

« Cette interdiction du recours à la force a été consacrée dans la Charte des Nations Unies en 1945 pour une bonne raison : empêcher les Etats de recourir à la force selon leur bon vouloir », a rappelé Louise Doswald-Beck, Secrétaire-générale de la CIJ.

Une guerre sans un mandat du Conseil de sécurité constituerait une violation flagrante et caractérisée de l’interdiction du recours à la force. La résolution 1441 du Conseil de sécurité n’autorise pas le recours à la force.

Lors de son adoption, la Chine, la France et la Russie, trois membres permanents du Conseil de sécurité, ont fait une déclaration interprétative soulignant que la résolution exclut tout recours automatique à la force.

Il demeure que 9 membres du Conseil de sécurité, dont les 5 membres permanents, doivent approuver le recours à la force, ce qui n’est définitivement pas le cas l’espèce.

Selon Ian Seiderman, Conseiller juridique à la CIJ : « le régime actuel en Irak s’est sans aucun doute rendu coupable de violations massives et systématiques des droits de l’homme.

Cependant, cette situation accablante des droits de l’homme ne constitue pas en elle-même une base juridique justifiant un recours à la guerre.

Il existe des mécanismes appropriés pour répondre à ces violations massives et systématiques : leur qualification comme crimes internationaux et le recours aux mécanismes de mise en œuvre de la responsabilité pénale tels que la Cour pénale internationale ».

Le pouvoir du Conseil de sécurité d’autoriser le recours à la force n’est pas illimitée. Le Conseil ne peut autoriser un tel recours que dans le but de maintenir la paix et la sécurité internationales.

Selon l’interprétation correcte des Etats actuellement opposés au recours à la force, la qualification d’une situation comme menace à la paix et à la sécurité internationales doit être fondée sur des critères objectifs suffisants.

Or, les preuves avancées par les Etats poussant à la guerre ne sont pas convaincantes.

Par conséquent, la Commission internationale de juristes prie instamment les gouvernements des Etats-Unis, du Royaume-Uni, d’Espagne et autres, même à ce stade tardif, de reconsidérer leurs choix politiques et de renoncer au recours illégal à la force contre l’Irak.

Conférence “Les disparus, le droit à savoir”: déclaration conjointe d’organisations non gouvernementales nationales, régionales et internationales

Conférence “Les disparus, le droit à savoir”: déclaration conjointe d’organisations non gouvernementales nationales, régionales et internationales

Déclaration de la CIJ et autres ONGs, auprès de la Conférence Internationale d’experts gouvernementaux et non-gouvernementaux “Les disparus, le droit à savoir”, organisée par le Comité International de la Croix-Rouge.

Nous saluons l’initiative du Comité International de la Crois-Rouge d’organiser cette Conférence internationale sur la question des “personnes portées disparues” et leurs familles. Nous soulignons l’importance de l’approche pratique faite par cette Conférence pour mieux répondre à ce problème à partir d’une perspective tant de Droit International Humanitaire que des Droits de l’Homme. L’identification de mesures d’actions pour faire face à l’incertitude et l’angoisse dans lesquelles vivent les familles des ‘personnes portées disparues’ ainsi que pour contribuer à résoudre les graves conséquences et souffrances causées par ces disparitions, est d’une grande importance.

La notion de “personnes portées disparues” employée par cette Conférence a trait à un ample ensemble de phénomènes distincts, qui ont lieu tant dans le cadre de conflits armés que de violences internes. Ceux-ci comprennent, entre autres, les disparitions en combats, les détentions “au secret” ou sous régime de non-communication, certaines modalités de déplacement de population et les disparitions forcées. Tous ces phénomènes ont en commun, d’une part, l’incertitude, le traumatisme et les grandes souffrances qu’ils causent aux familles de ‘personnes portées disparues et, d’autre part, le droit universellement reconnu qu’ont les familles de connaître le sort et le destin de leurs proches, c’est a dire le droit à la vérité.

Nous ne devons pas perdre de vue pour autant que, pour chacun de ces phénomènes, il existe déjà des normes et règles dans le Droit International Humanitaire et dans le Droit International des Droits de l’Homme, tant conventionnel que coutumier, ainsi qu’une importante jurisprudence des organes et des mécanismes internationaux. Il est certain que chacun de ces phénomènes, qui entre dans la catégorie des “personnes portées disparues”, dispose déjà d’un ensemble de normes et de règles internationales qui doivent être observées. Les mesures pratiques et opérationnelles proposées par cette Conférence pour répondre à ces problèmes, doivent être interprétées comme une contribution pour la mise en œuvre effective de ces normes et règles internationales.

Ainsi, les “Observations et recommandations” seraient cohérentes avec les efforts de la Communauté internationale pour le développement de nouveaux instruments juridiques de protection dans ce domaine, et avec l’esprit et l’objectif de cette Conférence.

Pour que cet important exercice d’identification de mesures pratiques contribue à renforcer la protection des personnes face aux différents phénomènes de disparition, ainsi que les efforts de la Communauté internationale dans la mise en œuvre des normes et règles existantes et pour le développement de nouvelles normes de protection, nous croyons nécessaire que les précisions précédentes soient adoptées par la Conférence et insérées dans le Rapport du Président.

Commission internationale de juristes (CIJ)
Latin American Federation of Associations of Families of the Disappeared (FEDEFAM)
International Service for Human Rights (ISHR)
World Organisation Against Torture (OMCT)
Physicians for Human Rights (PHR)
Argentine Team of Forensic Anthropology (EAAF)
Guatemalan Foundation of Forensic Anthropology (FAFG)
Peruvian Team of Forensic Anthropology (EPAF)
FASIC
Fundación Rigoberta Menchú
PROBUSQUEDA

conference missing-press release-2003-fra (text in French, PDF)

Translate »