Sep 21, 2018 | Nouvelles, Plaidoyer
La CIJ a écrit aujourd’hui à la Commissaire aux droits de l’Homme du Conseil de l’Europe, Dunja Mijatović, pour demander d’intervenir contre la décision des autorités turques d’interdire l’accès à la place Galatasaray d’Istanbul (Turquie) à un collectif de mères de personnes disparues appelées « les Mères du samedi ».
Le 25 août 2018, le sous-gouvernorat du district de Beyoğlu à Istanbul a prononcé une interdiction de se rassembler pour tout type de manifestation sur la place Galatasaray à Istanbul, la place où ont pris l’habitude de se réunir chaque samedi « les Mères du samedi » d’abord de 1995 à 1998, et ensuite de 2009 jusqu’à 2018.
À la 700ème semaine de leurs manifestations pacifiques, les Mères du samedi et leurs partisans se sont réunis en milieu de journée sur la place Galatasaray pour sensibiliser une fois de plus sur la nécessité pour les responsables des exécutions extrajudiciaires et des disparitions forcées les années 1990 de rendre des comptes.
La police a utilisé des gaz lacrymogènes pour mettre fin à la manifestation et a arrêté 47 personnes. Toutes ont été libérées samedi soir.
Des officiers supérieurs des autorités turques ont même publié des déclarations accusant les Mères du samedi d’avoir été abusées par des organisations terroristes ou d’être en collusion avec elles.
La CIJ a écrit au Commissaire européen aux droits de l’Homme qu’elle « considère que cette situation est contraire aux obligations de la Turquie en vertu du droit international humanitaire, en particulier du droit de réunion pacifique en vertu de l’article 11 de la Convention européenne des droits de l’Homme et 21 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques ».
La CIJ a ajouté que « compte tenu de la constance et de la présence des Mères du samedi sur la place Galatasaray au fil des ans, il est difficile de voir comment la restriction de leur droit de réunion pacifique pourrait être nécessaire et proportionnée à un objectif légitime.
Il est clair qu’aucun avertissement préalable pour le rassemblement n’était nécessaire pour des raisons de sécurité compte tenu de son occurrence régulière au moins depuis sa reprise en 2009, c’est-à-dire il y a neuf ans. En outre, la manifestation a eu lieu dans une zone piétonne où les voitures ne sont pas autorisées ».
ICJ-Letter-SaturdayMothers-CoEComm-Turkey-2018-ENG (télécharger la lettre, uniquement disponible en anglais)
Sep 18, 2018 | Plaidoyer
La CIJ a mis en lumière les graves menaces qui pèsent sur l’état de droit en Hongrie, en Pologne et en Turquie, lors de sa prise de parole au Conseil des droits de l’Homme à Genève.
La déclaration, faite pendant le débat général sur les situations nécessitant l’attention du Conseil, est la suivante:
«La Commission internationale de juristes (CIJ) voudrait attirer l’attention du Conseil sur les graves menaces qui pèsent sur l’état de droit en Hongrie, en Pologne et en Turquie.
En Pologne, le gouvernement a adopté une mesure législative pour imposer de manière arbitraire un «départ à la retraite» involontaire d’un tiers de ses juges à la Cour suprême, portant ainsi un coup fatal à l’indépendance du pouvoir judiciaire, déjà mis à mal par les réformes passées.
En Hongrie, de multiples réformes législatives ont affaibli l’indépendance des juges et puni les activités de certaines ONG de défense des droits de l’homme et restreint leur financement.
Enfin, en Turquie, la consolidation de mesures d’urgence en droit commun, des réformes constitutionnelles régressives, et le licenciements massif de juges et de procureurs a supprimé une protection essentielle pour le fonctionnement d’un pouvoir judiciaire indépendant.
La CIJ est en outre préoccupée par l’interdiction des manifestations des mères du samedi qui prévoit d’organiser des manifestations hebdomadaires à la mémoire des membres de leur famille disparus, en violation de leur droit à la liberté de réunion.
La CIJ est profondément préoccupée par l’escalade de telles menaces aux principes fondamentaux de l’état de droit en Europe, sans que des mesures spécifiques soient prises par le Conseil pour y remédier.
La CIJ exhorte le Conseil à prêter attention à ces développements, qui s’inscrivent dans le cadre d’une attaque mondiale plus vaste contre la primauté du droit [1] et à observer la situation des droits de l’homme dans ces pays.
[1] Voir la CIJ, «L’état de droit sous la menace mondiale» (déclaration lors du débat général sur le compte rendu oral du Haut Commissaire), 11 septembre 2018: https://www.icj.org/hrc39-gd2-hc/
Aug 21, 2018 | Articles, Nouvelles
La CIJ et sa section polonaise ont exprimé aujourd’hui leur soutien aux actions de la Cour suprême pour défendre l’état de droit et l’indépendance du pouvoir judiciaire en Pologne, notamment en recourant à la Cour de justice des Communautés européennes (CJCE).
Ces faits interviennent dans la foulée d’attaques répétées de la part de personnalités politiques et des autorités.
La préservation et la sauvegarde de l’indépendance des tribunaux sont essentielles pour la protection des droits de l’Homme en Pologne, ont déclaré les deux organisations.
La CIJ et sa section polonaise ont exhorté les autorités exécutives et législatives du pays à cesser toute ingérence dans la conduite de ses fonctions légitimes par la Cour suprême.
La loi sur la Cour suprême qui a abouti à la «retraite» forcée d’un tiers de la Cour suprême, y compris de la présidente de la Cour, Małgorzata Gersdorf, doit être abrogée et les juges réintégrés, ont souligné la CIJ et sa section polonaise.
Le 2 août, la Cour suprême de Pologne a pris l’initiative, bienvenue, de présenter une demande de décision préliminaire à la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE), conformément au droit de l’UE, afin de requérir son interprétation sur la conformité de la législation récente sur l’âge de la retraite des juges avec le droit de l’UE.
Plus précisément, la Cour suprême a demandé si la législation respectait le principe de l’inamovibilité des juges et de l’interdiction de la discrimination fondée sur l’âge en vertu de la directive 2000/78.
La Cour suprême a suspendu l’application de la loi tant que durera la procédure devant la CJUE.
La CIJ et sa section polonaise condamnent les attaques contre la Cour suprême de la part des autorités politiques, et notamment le président Andrzej Duda, qui ont prétendu que la suspension de l’application de la loi n’a aucun fondement juridique.
Au contraire, la Cour suprême de Pologne a agi dans le respect de ses obligations, en vertu de l’article 267 du Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (TFEU), pour questionner l’interprétation des traités et, conformément à la jurisprudence de la CJUE, et pour suspendre l’application de mesures qui pourraient constituer une violation du droit de l’Union européenne, dans l’attente du règlement de la question.
La législation soulève de sérieux problèmes en droit européen, tant en ce qui concerne la protection de l’état de droit en vertu de l’article 2 du TFEU que de la discrimination fondée sur l’âge.
Cette attaque contre les actions de la Cour suprême intervient alors que les autorités exécutives et législatives polonaises sapent systématiquement l’indépendance de la justice en Pologne, ce que la CIJ, sa section en Pologne et les juges du réseau mondial de la CIJ ont condamné à plusieurs reprises.
Les deux organisations soulignent que l’inamovibilité des juges est l’un des principaux piliers de l’indépendance judiciaire et donc de l’état de droit. Une lettre de la CIJ datée du 11 juillet 2018 (disponible uniquement en anglais), signée par 22 hauts magistrats de toutes les régions du monde, a exhorté le gouvernement polonais à agir immédiatement pour réintégrer les juges mis en retraite forcée.
Jul 31, 2018 | Articles, Nouvelles
Le meurtre de l’avocat serbe Dragoslav Ognjanović doit faire l’objet d’une enquête indépendante, rapide et approfondie et les auteurs doivent être traduits en justice, a déclaré aujourd’hui la CIJ.
Dragoslav Ognjanović (photo), éminent avocat qui avait défendu Slobodan Milosovic et représenté des accusés dans des affaires de criminalité organisée, a été abattu devant son domicile à Belgrade, samedi 28 juillet.
«La sécurité des avocats est essentielle au bon fonctionnement du système judiciaire et à la protection de la primauté du droit. Les autorités serbes doivent maintenant prendre des mesures urgentes pour rétablir un climat de confiance dans lequel elles montrent qu’elles sont capables d’assurer la sécurité des avocats potentiellement menacés, et pour enquêter et traduire en justice les auteurs de ce crime,” a déclaré Radmila Dragicevic-Dicic, juge à la Cour suprême de Serbie et vice-présidente de la CIJ.
“L’enquête et les suites pénales liées à cette affaire constitueront un test important pour les autorités et le système judiciaire serbes,” a-t-elle ajouté.
Les barreaux de Serbie et de Belgrade ont appelé les avocats à suspendre leur travail durant une semaine pour exprimer leur préoccupation face au risque de violence qui les menace.
Les autorités serbes mettent cette situation sur le compte de la guerre de clans que se livrent les groupes du crime organisé pour le contrôle du marché de la drogue.
“Les préoccupations des avocats serbes doivent être prises au sérieux par le gouvernement et le parquet, et les barreaux devraient être consultés sur les moyens d’assurer la sécurité des avocats,” a dit Róisín Pillay, directrice du programme Europe de la CIJ.
Jul 18, 2018 | Communiqués de presse, Nouvelles, Publications, Rapports
La CIJ a salué aujourd’hui la levée de l’état d’urgence en vigueur en Turquie depuis presque deux ans, qui devrait être effective à partir de minuit. La CIJ a toutefois ajouté que les autorités devaient désormais instaurer une série de mesures visant à rétablir l’état de droit dans le pays.
La prise de position de la CIJ coïncide avec la publication de son rapport Justice Suspended – Access to Justice and State of Emergency in Turkey (disponible en anglais seulement) qui décrit comment les mesures prises en vertu de l’état d’urgence, notamment la révocation massive de magistrats et les arrestations et poursuites arbitraires d’avocats et de défenseurs des droits de l’Homme, ont érodé les institutions et les mécanismes judiciaires du pays.
Le rapport préconise, entre autres, l’abrogation de ces mesures, le rétablissement de l’indépendance du système judiciaire et la réforme des lois antiterroristes du pays.
“Avec la fin de l’état d’urgence, nous appelons au retrait immédiat des notifications de dérogations à la Convention européenne des droits de l’homme et au Pacte international relatif aux droits civils et politiques,” a déclaré Massimo Frigo, conseiller juridique principal pour le programme Europe et Asie centrale de la CIJ.
“Nous sommes préoccupés par le fait que la plupart de ces mesures d’exception restent ancrées dans la loi turque, avec des des conséquences pernicieuses à long terme sur la jouissance des droits de l’Homme élémentaires et les bases de l’Etat de droit dans le pays,” a-t-il ajouté.