Liban – Procès de l’avocat Mugraby: l’aberration d’une juridiction militaire pour un chef d’inculpation absurde

Liban – Procès de l’avocat Mugraby: l’aberration d’une juridiction militaire pour un chef d’inculpation absurde

La Commission internationale de juristes (CIJ) demande le retrait immédiat et inconditionnel du chef d’inculpation formulé à l’encontre de l’avocat Dr Mugraby et l’annulation définitive de son procès, prévu pour le 20 mars 2006. L’organisation a saisi les ministres de la justice et de la défense pour mettre un terme immédiat à cette grave dérive.

L’avocat Dr Mugraby a été inculpé de « diffamation de l’institution militaire et de ses officiers» en relation avec les propos qu’il a tenus devant la délégation des pays du Mashrek du Parlement européen le 4 novembre 2003 à Bruxelles.

Dans son intervention, le Dr Mugraby a critiqué le système judiciaire libanais, et notamment les cours militaires, le recours à la torture et l’instrumentalisation, par les autorités libanaises, des tribunaux militaires et civils afin de réduire au silence les voix dissidentes.

Ce chef d’accusation constitue une violation flagrante des obligations internationales du Liban relatives au droit à la liberté d’opinion et d’expression, consacré non seulement dans le Pacte international relatif aux droits civils et politiques (article 19) et les Principes de base relatifs au rôle du barreau (Principe 23), mais également dans la constitution libanaise elle-même.

« La critique fait partie intégrante du droit à la liberté d’opinion et d’expression et ne saurait être pénalisée en aucuns cas » a souligné la CIJ.

D’autre part, la tenue de ce procès devant une cour militaire est non seulement incompatible avec le principe général de la non-comparution de civils devant des juridictions militaires, mais elle bafoue également les injonctions du Comité des droits de l’homme qui avait déjà appelé les autorités libanaises en 1997 à ne plus traduire en justice des civils devant ces juridictions.

«Il est consternant de constater que plus de neuf ans après cette recommandation par un organe de l’ONU, le gouvernement libanais persiste à poursuivre des civils devant des tribunaux relevant de l’autorité militaire », a ajouté la CIJ.

Pour la CIJ, « ce procès devant une cour militaire constitue une aberration et ce chef d’inculpation une violation grave d’un droit fondamental. »

Le cas du Dr Mugraby, un avocat réputé pour sa défense des victimes de violations des droits de l’homme, est bien connu de la CIJ, qui a suivi depuis plusieurs années les nombreuses procédures judiciaires dont il a fait l’objet.

En octobre 2003, la CIJ avait notamment déjà assisté à son procès et avait conclu que ce dernier ne respectait pas les normes internationales de procès équitables.

« L’inculpation pour ‘diffamation’ n’est que la dernière forme de harcèlement à l’encontre du Dr Mugraby afin d’entraver son travail d’avocat, et doit cesser définitivement», a conclu l’organisation.

Lebanon-trail mugraby-press release-2006-fra (Texte complet en PDF)

Annonce des nominés au Prix Martin Ennals 2006

Annonce des nominés au Prix Martin Ennals 2006

Le Jury du Prix Martin Ennals pour les Défenseurs des Droits de l’Homme (MEA) a annoncé aujourd’hui que les 4 nominés au Prix 2006 sont les suivants:

Akbar Ganji (Iran)
Akbar Ganji est en prison pour avoir exprimé publiquement ses opinions en faveur des réformes démocratiques et pour avoir dénoncé des crimes d’Etat. Il a été torturé et maltraité. Depuis 2000 il a été inculpé « d’atteinte à la sécurité nationale et de propagande contre les institutions de l’Etat islamique ». Certains considèrent que sa vie est en danger.

Arnold Tsunga (Zimbabwe)
Arnold Tsunga a défendu les victimes d’abus en matière des droits humains et a mené campagne pour un plus grand respect des droits de l’Homme ; il a dénoncé à maintes reprises le système de justice antidémocratique. Il a été menacé, arrêté et est constamment harcelé.

Golden Misabiko (RD Congo)
Golden Misabiko a dénoncé pendant les derniers 20 ans les violations des droits humains dans son pays. Il a été torturé en 2001 et, en raison de menaces de mort, il a du s’exiler en 2001. Il est rentré dans son pays en 2005 et depuis il a été arrête à plusieurs reprises et constamment harcelé.

Jennifer Williams (Zimbabwe)
Jennifer Williams, un des leaders de WOZA (Women of Zimbabwe Arise), continue à organiser et à diriger des manifestations pacifiques de protestation contre la dégradation de la situation des droits des droits de l’Homme, malgré qu’elle ait été arrêtée et battue par la police.

Le Jury a décidé qu’à l’avenir, les noms des nominés seront publiés parce qu’ils ont tous urgemment besoin de protection. Les quatre défenseurs ont été retenus par les dix organisations des droits de l’Homme qui forment le Jury après une sélection minutieuse. Le 23 mai prochain, le Jury annoncera le lauréat final du MEA à l’occasion d’une conférence dans le Centre Carter à Atlanta (Etats-Unis).

Les membres du Jury sont: Amnesty International, la Commission internationale de juristes, Diakonie Allemagne, la Fédération internationale des droits de l’Homme, Human Rights First, Human Rights Watch, HURIDOCS, International Alert, l’Organisation mondiale contre la torture, le Service international pour les droits de l’Homme.

La Tunisie et le Sommet Mondial sur la Société de l’Information: le droit à la liberté d’opinion et d’expression bafoué

La Tunisie et le Sommet Mondial sur la Société de l’Information: le droit à la liberté d’opinion et d’expression bafoué

La CIJ exprime ses graves préoccupations concernant l’absence de volonté de la part du gouvernement tunisien – hôte du Sommet Mondial sur la Société de l’Information (SMSI) en novembre 2005 – de respecter le droit à la liberté d’opinion et d’expression.

La détention arbitraire et la condamnation de l’avocat Me Mohammed Abbou pour avoir exercé ce droit constitue un paradoxe en regard des principes mêmes sur lesquels se fonde le SMSI.

Me Abbou a été condamné en avril 2005 à trois ans et demi de prison lors d’un procès inique portant sur deux chefs d’accusation. Suite à la publication d’un article en août 2004 dans lequel il comparait les conditions de détention dans les prisons tunisiennes avec celles d’Abu Ghraib en Iraq, Me Abbou a été condamné pour « publication d’écrits de nature à troubler l’ordre public » et pour « diffamation d’instances judiciaires ».

Une semaine avant le procès, il a aussi été accusé d’avoir agressé une avocate en juin 2002 – une accusation qui n’a pu être prouvée. La condamnation a été confirmée en juin 2005.

Tunisia-lack repect right-press release-2005 (Communiqué de presse complet en PDF)

Le tribunal confisque la liberté d’expression de la Ligue Tunisienne des Droits de l’Homme

Le tribunal confisque la liberté d’expression de la Ligue Tunisienne des Droits de l’Homme

La CIJ déplore la décision du Tribunal de première instance de Tunis de ne pas autoriser cette organisation affiliée à la CIJ à tenir son congrès annuel comme prévu les 9, 10 et 11 septembre 2005.

« Alors que la Tunisie sera bientôt l’hôte du Sommet Mondial sur la Société de l’Information, de tels agissements deux semaines avant la réunion préparatoire du Sommet révèlent les contradictions flagrantes entre l’image que le pays tente de projeter sur la scène internationale et la répression au niveau interne » a déclaré le Secrétaire Général de la CIJ, M. Nicholas Howen.

La CIJ déplore de telles procédures à l’égard de son affilié, de même qu’à l’encontre de tout autre organisation ou personne œuvrant pour la protection et la promotion des droits de l’homme. « De telles pratiques constituent une violation flagrante des obligations internationales de la Tunisie, notamment les droits à la liberté d’expression, de réunion pacifique et d’association consacrés dans le Pacte international relatif aux droits civils et politiques » a poursuivi M. Howen. La décision du Tribunal est d’autre part totalement contraire à la Déclaration sur les Défenseurs des Droits de l’Homme qui réaffirme le droit des individus et des associations à « protéger et promouvoir la réalisation des droits de l’homme et des libertés fondamentales. »

La CIJ constate d’autre part que les entraves à l’encontre du travail de la Ligue s’inscrivent dans un contexte d’intensification des contraintes et de harcèlement de la part des autorités à l’égard de plusieurs organisations, comme l’Association des Magistrats Tunisiens. En outre, l’annulation du Congrès annuel de la LTDH n’est pas une première, puisque ce même Tribunal de première instance de Tunis avait déjà annulé le 12 janvier 2001 une précédente assemblée générale. « Il est très préoccupant de constater que les instances juridiques persistent à prendre des décisions contraires aux obligations internationales de la Tunisie et s’acharnent à harceler une organisation qui ne fait que défendre et promouvoir les droits de l’homme » a ajouté M. Howen.

La LTDH a été assignée en référé le 1er septembre 2005, et le 5 septembre, le Tribunal de première instance a intimé l’ordre à la Ligue de suspendre son congrès ainsi que tous les travaux préparatoires visant à en faciliter la tenue.

Par ailleurs, la chambre civile du Tribunal de première instance de Tunis examinera ultérieurement une demande d’annulation de la convocation du Comité Directeur de la LTDH pour son 6ème Congrès.

La CIJ réaffirme son ferme soutien à son affilié et demande instamment que la Ligue puisse se réunir comme elle l’entend et mener dorénavant ses travaux sans entraves et harcèlement d’aucune sorte.

Tunisia-Ligue des Droits de l’Homme-press release-2005-fra (text in French, PDF)

Tunisia-Ligue des Droits de l’Homme-press release-2005-ara (text in Arabic, PDF)

Aktham Naisse finalement acquitté!

Aktham Naisse finalement acquitté!

naisseLa CIJ et d’autres groupes de défense des droits de l’Homme se félicitent de la décision de la Cour suprême syrienne de sûreté de l’Etat à Damas (SSSC) d’abandonner les charges à l’encontre d’Aktham Naisse (photo).

Le Réseau euro-méditerranéen des droits de l’Homme (REMDH), la Commission internationale de juristes (CIJ), l’Observatoire pour la protection des défenseurs des droits de l’Homme, programme conjoint de la Fédération internationale des ligues des droits de l’Homme (FIDH) et de l’Organisation mondiale contre la torture (OMCT), et la Fondation Martin Ennals (MEF) se félicitent de la décision de la Cour suprême syrienne de sûreté de l’Etat à Damas (SSSC), le 26 juin 2005, d’abandonner l’ensemble des charges à l’encontre du défenseur syrien des droits de l’Homme Aktham Naisse.

M. Aktham Naisse est un éminent avocat syrien et est président du Comité pour la défense des libertés démocratiques et des droits de l’Homme en Syrie (CDF), organisation membre du REMDH, de la FIDH et de l’OMCT.

Il a par ailleurs reçu cette année le prix Martin Ennals pour les Défenseurs des Droits de l’Homme (MEA) pour son travail en faveur des droits de l’Homme.

La cérémonie de remise du Prix Martin Ennals aura lieu à Genève le 12 octobre 2005, et le prix sera remis par Mme Louise Arbour, Haut Commissaire des Nations unies aux droits de l’Homme.

M. Naisse a été arrêté le 13 avril 2004 et libéré sous caution le 17 août 2004, suite à une décision de la SSSC. M. Naisse était inculpé des chefs d'”opposition aux objectifs de la révolution” et de “dissémination de fausses informations dans le but d’affaiblir l’Etat”, et risquait une peine d’emprisonnement de 15 ans.

Le 25 juin 2005, le CDF a publié un communiqué de presse dans lequel M. Naisse déclarait qu’il n’assisterait pas à l’audience de dimanche.

Sa décision se fondait sur le fait que la SSSC est une “cour d’exception inconstitutionnelle” et qu’elle ne satisfait pas aux “standards reconnus en matière de droit à un procès équitable”.

Le 26 juin 2005, en l’absence de M. Naisse, la Cour a finalement annoncé que M. Naisse était déclaré non coupable des “activités” dont il était accusé.

Il est frappant que la Cour n’ait plus fait référence à des “crimes” mais à des “activités”.

Syria-Naisse acquitted-press release-2005-fra (Texte complet en PDF)

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