Des juristes du monde entier se réunissent pour protéger les droits de l’Homme dans la lutte contre le terrorisme

Des juristes du monde entier se réunissent pour protéger les droits de l’Homme dans la lutte contre le terrorisme

La conférence biennale de la Commission Internationale de Juristes (CIJ) sur le thème « Terrorisme et droits de l’Homme – enjeux et réponses » aura lieu à Berlin du 27 au 28 août 2004 avec le soutien du Ministère allemand des Affaires étrangères.

La conférence réunira cent soixante éminents juristes et activistes internationaux des droits de l’Homme, venant de plus de soixante pays pour rassembler la communauté juridique mondiale et pour réaffirmer que la lutte contre le terrorisme peut et doit se mener dans le respect des droits de l’Homme.

Dans le climat d’insécurité générale que crée le spectre terroriste, le droit international et les droits de l’Homme font face à de nouvelles menaces. Certaines mesures anti-terroristes adoptées depuis 2001 violent des garanties bien établies des droits de l’Homme, telles que la prohibition de la torture.

Dans certains pays, la « guerre contre le terrorisme » a donné une légitimité douteuse à des violations de droits de l’Homme, commises depuis des années au nom de la sécurité nationale.

« Les gouvernements doivent protéger leurs citoyens, mais les mesures anti-terroristes posent l’une des plus graves menaces pour l’Etat de droit et les droits de l’Homme que nous ayons vue en plus de cinquante ans », déclare Nicholas Howen, Secrétaire général de la CIJ.

« Nous rassemblons cent soixante juges, avocats et experts en droits de l’Homme bénéficiant d’une longue expérience, qui ont eux-mêmes été témoins de cycles terroristes et anti-terroristes dans leur propre pays. Ils formuleront des principes juridiques claires et définiront les limites acceptables aux mesures anti-terroristes», ajoute-t-il.

La nouvelle Haut Commissaire aux droits de l’Homme des Nations Unis, Louise Arbour, interviendra lors de la conférence pour clarifier, pour la première fois depuis son entrée en fonction, sa position sur le thème des droits de l’Homme dans la lutte contre le terrorisme.

Le juge Arthur Chaskalson, Président de la CIJ et Président de la Cour constitutionnelle d’Afrique du Sud, ainsi que Hina Jilani, Représentante spéciale des Nations Unis pour les défenseurs des droits de l’Homme, feront également partie des intervenants. Interviendront aussi Kerstin Müller, Ministre adjointe aux Affaires étrangères et Brigitte Zypries, Ministre de la Justice.

La Commission Internationale de Juristes est un réseau de juges et d’avocats unis dans la défense et l’avancement du droit international, des principes de l’Etat de droit et des droits de l’Homme. L’organisation, fondée en 1952 à Berlin, a son siège à Genève et comprend soixante juristes internationaux de toutes les régions du monde.

« Après un demi-siècle, la CIJ retourne à son lieu de naissance pour défendre les valeurs sur lesquelles elle se fonde dans un climat international qui préoccupe de plus en plus la communauté internationale des droits de l’Homme », déclare M. Howen.

LIEU

Ministère des affaires étrangères,
Berlin, Allemagne.
Werderscher Markt 1 (entrée principale)
Unterwasserstrasse 10 (entrée pour la conférence)

LANGUES
La conférence se tiendra en anglais et français, avec traduction simultanée.

terorism conference Berlin-press release-2004-fra (Communiqué de presse complet, PDF)

terorism conference Berlin-events-2004-fra (biographies des intervenants en ENG, PDF)

 

Cette guerre illicite doit être conduite de façon licite

Cette guerre illicite doit être conduite de façon licite

La CIJ condamne l’invasion illicite de l’Irak en l’absence manifeste d’un mandat du Conseil de sécurité. Cette attaque constitue une nette régression dans l’application du droit international et en ébranle les fondements.

Maintenant que l’attaque armée a été lancée, il est impératif que les Etats prêtent attention à ne pas aggraver la situation par la commission d’autres actions illicites.

Toutes les parties au conflit sont dans l’obligation de respecter les prescriptions de droit humanitaire et les normes de droits de l’homme contenues dans les Conventions de Genève de 1949 et autres instruments internationaux pertinents et dans le droit international coutumier.

Le fait que l’Irak ait été illicitement envahi ne saurait en aucun cas le dédouaner du strict respect du droit international humanitaire et des normes de droits de l’homme.

Les Etats qui ne prennent pas part aux hostilités doivent respecter et bénéficier du droit de la neutralité. Ils ne doivent en particulier pas autoriser que leur territoire soit utilisé à des fins militaires et ne peuvent faire l’objet d’une attaque.

Les Etats belligérants sont dans l’obligation de traiter humainement toute personne en leur pouvoir. Les personnes qui se rendent ne peuvent être attaquées.

Toutes les parties au conflit doivent distinguer les objectifs militaires des populations et biens à caractère civils. Ces derniers ne peuvent être la cible d’une attaque.

La CIJ souhaite souligner que tous les Etats doivent scrupuleusement respecter les règles prohibant ou limitant l’usage de certaines armes. Aucune arme qui cause des souffrances excessivement cruelles ou frappant sans discrimination ne peut être utilisée, même à défaut d’une interdiction conventionnelle spécifique.

La CIJ est particulièrement préoccupée par les informations selon lesquelles certaines parties au conflit envisageraient d’utiliser des agents chimiques. Il est indispensable que les Etats parties à la Convention sur les armes chimiques aient une interprétation stricte de celle-ci.

Par ailleurs, le Protocole de Genève de 1925 et le droit coutumier interdisent de façon absolue le recours aux armes chimiques.

“Nous espérons que ces règles ne seront pas traitées par les Etats participant au conflit aussi cavalièrement qu’ils ont traité la Charte des Nations Unies”, a noté Louise Doswald-Beck, Secrétaire Générale de la CIJ.

La CIJ rappelle l’interdiction absolue de commettre des crimes de guerre et des crimes contre l’humanité. La commission de tels crimes entraîne la responsabilité pénale de leurs auteurs, qu’ils soient chefs d’Etat ou simple soldat.

Tous les Etats sont dans l’obligation de s’assurer que les personnes soupçonnées de tels crimes sont poursuivies. Enfin, les Etats parties au Statut de Rome sur la Cour pénale internationale doivent poursuivent les auteurs de ces infractions ou, à défaut, les remettre à la Cour pénale internationale.

La CIJ déplore l’annonce d’une guerre d’agression contre l’Irak

La CIJ déplore l’annonce d’une guerre d’agression contre l’Irak

La CIJ exprime aujourd’hui sa profonde consternation alors qu’un nombre restreint d’Etats se tiennent prêts à lancer une invasion de l’Irak qui, au regard du droit international, est illicite et constituerait une guerre d’agression.

Les Etats-Unis, le Royaume-Uni et l’Espagne ont notifié leur intention de recourir à la force, et ce, même sans résolution du Conseil de sécurité des Nations Unies. Il n’y a aucune autre base juridique possible à une telle intervention.

En l’absence d’une autorisation du Conseil de sécurité, aucun Etat ne saurait recourir à la force contre un autre Etat, sauf en cas de légitime-défense, en réponse à une attaque armée.

« Cette interdiction du recours à la force a été consacrée dans la Charte des Nations Unies en 1945 pour une bonne raison : empêcher les Etats de recourir à la force selon leur bon vouloir », a rappelé Louise Doswald-Beck, Secrétaire-générale de la CIJ.

Une guerre sans un mandat du Conseil de sécurité constituerait une violation flagrante et caractérisée de l’interdiction du recours à la force. La résolution 1441 du Conseil de sécurité n’autorise pas le recours à la force.

Lors de son adoption, la Chine, la France et la Russie, trois membres permanents du Conseil de sécurité, ont fait une déclaration interprétative soulignant que la résolution exclut tout recours automatique à la force.

Il demeure que 9 membres du Conseil de sécurité, dont les 5 membres permanents, doivent approuver le recours à la force, ce qui n’est définitivement pas le cas l’espèce.

Selon Ian Seiderman, Conseiller juridique à la CIJ : « le régime actuel en Irak s’est sans aucun doute rendu coupable de violations massives et systématiques des droits de l’homme.

Cependant, cette situation accablante des droits de l’homme ne constitue pas en elle-même une base juridique justifiant un recours à la guerre.

Il existe des mécanismes appropriés pour répondre à ces violations massives et systématiques : leur qualification comme crimes internationaux et le recours aux mécanismes de mise en œuvre de la responsabilité pénale tels que la Cour pénale internationale ».

Le pouvoir du Conseil de sécurité d’autoriser le recours à la force n’est pas illimitée. Le Conseil ne peut autoriser un tel recours que dans le but de maintenir la paix et la sécurité internationales.

Selon l’interprétation correcte des Etats actuellement opposés au recours à la force, la qualification d’une situation comme menace à la paix et à la sécurité internationales doit être fondée sur des critères objectifs suffisants.

Or, les preuves avancées par les Etats poussant à la guerre ne sont pas convaincantes.

Par conséquent, la Commission internationale de juristes prie instamment les gouvernements des Etats-Unis, du Royaume-Uni, d’Espagne et autres, même à ce stade tardif, de reconsidérer leurs choix politiques et de renoncer au recours illégal à la force contre l’Irak.

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