La Commission Internationale de Juristes préoccupée par les graves atteintes à l’indépendance du pouvoir judiciaire au Niger

La Commission Internationale de Juristes préoccupée par les graves atteintes à l’indépendance du pouvoir judiciaire au Niger

La CIJ déplore la suspension des pouvoirs de la Cour Constitutionnelle, l’éviction de ses sept juges et la modification des modalités de nomination du juge constitutionnel.
La CIJ condamne énergiquement ces actes qui portent gravement atteinte à l’indépendance du pouvoir judiciaire et compromettent sérieusement les acquis de l’état de droit au Niger.
La CIJ exhorte les autorités compétentes nigériennes de tout mettre en oeuvre en vue du retrait immédiat de ces décrets présidentiels et le rétablissement de l’état de droit en République du Niger.
La CIJ fait observer que ces décrets présidentiels sont la réponse à deux arrêts de la Cour Constitutionnelle jugeant anticonstitutionnelle la convocation d’un referendum constitutionnel ayant essentiellement pour effet de modifier la constitution en vue d’accorder au Président de la République sortant la possibilité de briguer un troisième mandat consécutif.
Pourtant, la Constitution limite en son article 36 le mandat présidentiel à cinq ans renouvelables une seule fois et prescrit à l’article 105 l’inamovibilité et l’irrévocabilité des juges de la Cour Constitutionnelle.
La CIJ soutient fermement que les décrets présidentiels, en ce qu’ils privent la plus haute juridiction nigérienne de ses prérogatives constitutionnelles de garant de l’état de droit et des droits humains, violent sérieusement le principe de l’indépendance du pouvoir judiciaire garanti à l’article 98 de la Constitution nigérienne.
Ils constituent également une violation flagrante de l’article 14 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques et l’article 26 de la Charte Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples, auxquels la République du Niger est un État partie.
Lesdits décrets constituent aussi une violation flagrante des Principes fondamentaux relatifs à l’indépendance de la magistrature, des Nations Unies, et des Principes et directives sur le droit à un procès équitable et à l’assistance judiciaire en
Afrique, de l’Union Africaine.
La exhorte les autorités compétentes nigériennes de tout mettre en oeuvre pour le retrait immédiat et inconditionnel de ces décrets présidentiels. L’ICJ demande aussi au Gouvernement nigérien de respecter scrupuleusement l’indépendance du pouvoir judiciaire et l’état de droit tels que prescrits par la constitution nigérienne et ses engagements régionaux et internationaux.
Niger-independence judiciary-press release-2009 (Communiqué de presse complet en PDF)
Congrès mondial 2008 de la CIJ

Congrès mondial 2008 de la CIJ

Déclaration et plan d’action de la CIJ sur le rôle des juges et avocats en temps de crise

Réaffirmant que sa mission première est de soutenir les principes de l’état de droit, l’indépendance du judiciaire et la profession juridique et les droits de l’Homme ; Rappelant que les principes de séparation des pouvoirs publics et de l’indépendance de la magistrature sont des fondements de l’état de droit et doivent rester invulnérables en temps de crise;

Insistant sur l’universalité, l’indivisibilité et l’interdépendance de tous les droits de l’Homme et le besoin de protéger en temps de crise les droits civils, culturels, économiques, politiques et sociaux ;

Reconnaissant qu’en temps de crise, les juges et avocats, incluant les procureurs, conseils et conseillers du gouvernement, peuvent subir une pression telle qu’il leur est difficile de remplir leur rôle essentiel de protecteurs et garants des droits de l’Homme ;

Conscient que de telles crises peuvent consister en ou résulter, parmi d’autres situations, d’un état d’urgence déclaré ou non, d’un conflit armé, d’instabilité politique intérieure, d’une période de justice transitionnelle, d’un état de troubles civils, d’une situation généralisée de violence, de terrorisme, d’un bouleversement social ou économique, ou d’un désastre naturel ;

Rappelant le rôle fondamental de la communauté juridique dans l’opposition à l’impunité des violations de droits de l’Homme et du droit international humanitaire ;

Réaffirmant que les victimes de violations des droits économiques, sociaux et culturels doivent être protégées, notamment en ayant accès à un recours judiciaire effectif ;

Rappelant son engagement à prendre des mesures concrètes afin de promouvoir l’abolition de la peine de mort, et exhortant les états qui maintiennent la peine de mort à l’abolir et, en attendant, à instituer un moratoire sur cette pratique;

Rappelant ses déclarations, résolutions et conclusions adoptées lors de Conférences précédentes et notamment, l’Acte d’Athènes relatif à l’état de droit (1955), la Déclaration de Delhi relative à l’état de droit dans une société libre (1959), la Loi de Lagos (1961), la Résolution de Rio de Janeiro relative à l’Action de l’Exécutif et l’état de droit (1962), la Déclaration de Bangkok (1965), les Conclusions de Vienne relatives aux Droits de l’Homme dans un monde non démocratique (1977), le Plan d’action de Caracas Plan relatif à l’indépendance des juges et avocats (1989) et la Déclaration de Berlin relative à la défense des droits de l’homme et de l’état de droit dans la lutte contre le terrorisme (2004) et les principes et standards auxquels la CIJ est dévouée;

Rappelant les principes et standards des Nations Unies, notamment les Principes fondamentaux relatifs à l’indépendance de la magistrature, les Principes de base relatifs au rôle du barreau et les Principes directeurs applicables au rôle des magistrats du parquet ;

Suite dans le PDF ci-dessous:

ICJ Declaration and Plan of Action-Events-2008-Spa (Texte complet en PDF)

Répression de l’affilié de la CIJ dans un contexte de harcèlement judiciaire croissant

Répression de l’affilié de la CIJ dans un contexte de harcèlement judiciaire croissant

La CIJ considère que le harcèlement répété des autorités tunisiennes à l’égard de la Ligue Tunisienne des Droits de l’Homme (LTDH), son affilié, constitue une atteinte inacceptable à ses activités légitimes. 

Le blocus et les abus policiers ont empêché, le 28 mai, la tenue du Congrès national de la LTDH, rappelle la CIJ.

La LTDH avait initialement prévu de tenir son 6ème Congrès national du 9 au 11 septembre 2005, mais le Tribunal de première instance de Tunis lui avait ordonné en référé de suspendre ses assises ainsi que tous les travaux préparatoires.

Déjà à cette occasion, la CIJ avait condamné la décision du Tribunal comme contraire à la Déclaration sur les Défenseurs des Droits de l’Homme de l’ONU qui consacre le droit de chacun, individuellement ou collectivement, de « promouvoir la protection et la réalisation des droits de l’homme et des libertés fondamentales » et de « se réunir et se rassembler pacifiquement ».

La LTDH avait décidé de reporter son Congrès aux 27 et 28 mai, mais les autorités tunisiennes ont déployé un dispositif policier d’envergure afin d’empêcher l’accès des participants à la réunion, allant même jusqu’à bloquer certaines routes pour refouler des membres des comités de section locales qui se rendaient au siège de la LTDH à Tunis.

Les forces de l’ordre ont bloqué l’accès au bureau central de la Ligue à des diplomates étrangers et autres invités, dont des ligues affiliées à la FIDH, par exemple l’Association Marocaine des Droits de l’Homme et l’Organisation Marocaine des Droits Humains, cette dernière également affiliée à la CIJ. Seuls les membres du Comité directeur ont pu se réunir, mais certains d’entre eux ont été agressés et insultés par des policiers.

« Les ressources considérables déployées par les autorités tunisiennes pour museler le congrès annuel d’une des plus anciennes organisations de défense des droits de l’homme dans la région reflètent le mépris croissant de la Tunisie pour les droits de l’homme, et notamment le droit fondamental à la liberté d’opinion, d’expression et d’association », a souligné la CIJ.

Ces incidents interviennent dans un contexte de tensions croissantes entre les autorités et le monde judiciaire tunisiens.

A la suite de l’adoption d’une nouvelle loi par le Parlement le 9 mai créant un Institut supérieur du barreau, plusieurs avocats qui participaient à un sit-in pour dénoncer cette loi ont été agressés physiquement par la police.

Quelques jours plus tard, le 23 mai, des avocats qui protestaient devant le Palais de Justice contre cette même loi qui, d’après eux, « porte atteinte à l’indépendance de la profession, le barreau ne jouant aucun rôle dans cette école », ont été tabassés par la police.

La CIJ constate que les autorités tunisiennes, loin de garantir la protection des avocats et de s’assurer que ces derniers puissent “s’acquitter de toutes leurs fonctions professionnelles sans entrave, intimidation, harcèlement ni ingérence indue” comme l’exigent les Principes de base relatifs au rôle du barreau de l’ONU, sont au contraire celles-là mêmes qui matraquent, répriment ou même détiennent des avocats en prison, tel Maître Abbou.

« Il est paradoxal de constater que la Tunisie, à peine élue membre du tout nouveau Conseil des Droits de l’Homme et qui se targue d’avoir ‘mis en œuvre un cadre juridique complet afin d’éviter toute violation des droits de l’homme’, intensifie sa répression à l’égard des défenseurs des droits de l’homme et des principes d’une justice indépendante », a relevé l’organisation.

Elle appelle les autorités tunisiennes à respecter les droits de l’homme fondamentaux et notamment les engagements qu’elles ont pris au moment de leur élection au Conseil, ainsi qu’à cesser tout harcèlement des défenseurs des droits de l’homme et des professionnels de la justice.

Alors que le Tribunal devrait statuer sur le fond le 3 juin 2006, la CIJ demande l’annulation définitive de toute procédure judiciaire à l’encontre de son affilié.

Tunisia-repression affiliate-press release-FRE-2006

Annonce des nominés au Prix Martin Ennals 2006

Annonce des nominés au Prix Martin Ennals 2006

Le Jury du Prix Martin Ennals pour les Défenseurs des Droits de l’Homme (MEA) a annoncé aujourd’hui que les 4 nominés au Prix 2006 sont les suivants:

Akbar Ganji (Iran)
Akbar Ganji est en prison pour avoir exprimé publiquement ses opinions en faveur des réformes démocratiques et pour avoir dénoncé des crimes d’Etat. Il a été torturé et maltraité. Depuis 2000 il a été inculpé « d’atteinte à la sécurité nationale et de propagande contre les institutions de l’Etat islamique ». Certains considèrent que sa vie est en danger.

Arnold Tsunga (Zimbabwe)
Arnold Tsunga a défendu les victimes d’abus en matière des droits humains et a mené campagne pour un plus grand respect des droits de l’Homme ; il a dénoncé à maintes reprises le système de justice antidémocratique. Il a été menacé, arrêté et est constamment harcelé.

Golden Misabiko (RD Congo)
Golden Misabiko a dénoncé pendant les derniers 20 ans les violations des droits humains dans son pays. Il a été torturé en 2001 et, en raison de menaces de mort, il a du s’exiler en 2001. Il est rentré dans son pays en 2005 et depuis il a été arrête à plusieurs reprises et constamment harcelé.

Jennifer Williams (Zimbabwe)
Jennifer Williams, un des leaders de WOZA (Women of Zimbabwe Arise), continue à organiser et à diriger des manifestations pacifiques de protestation contre la dégradation de la situation des droits des droits de l’Homme, malgré qu’elle ait été arrêtée et battue par la police.

Le Jury a décidé qu’à l’avenir, les noms des nominés seront publiés parce qu’ils ont tous urgemment besoin de protection. Les quatre défenseurs ont été retenus par les dix organisations des droits de l’Homme qui forment le Jury après une sélection minutieuse. Le 23 mai prochain, le Jury annoncera le lauréat final du MEA à l’occasion d’une conférence dans le Centre Carter à Atlanta (Etats-Unis).

Les membres du Jury sont: Amnesty International, la Commission internationale de juristes, Diakonie Allemagne, la Fédération internationale des droits de l’Homme, Human Rights First, Human Rights Watch, HURIDOCS, International Alert, l’Organisation mondiale contre la torture, le Service international pour les droits de l’Homme.

Confirmation en appel de la condamnation de l’avocat tunisien Abbou: justice illusoire, condamnation réelle

Confirmation en appel de la condamnation de l’avocat tunisien Abbou: justice illusoire, condamnation réelle

La CIJ et la FIDH expriment leur consternation à l’annonce de la confirmation, par la Cour d’appel de Tunis, de la condamnation de Maître Abbou à 3 ans et demi de prison.

Cette condamnation intervient à l’issue d’une audience marathon. La CIJ et la FIDH dénoncent ce qui ressemble à une parodie de procès où le droit à un procès équitable est de nouveau bafoué par la justice tunisienne.

La CIJ et la FIDH qui avaient mandaté un observateur judiciaire au procès en appel de Maître Abbou dénoncent les conditions déplorables dans lesquelles s’est déroulé le procès, aux mépris des règles les plus élémentaires du droit à un procès équitable par un tribunal compétent, indépendant et impartial établi par la loi.

« Ce procès démontre une fois de plus les compromissions et l’instrumentalisation de la justice tunisienne. La justice fait partie intégrante de l’appareil répressif des autorités tunisiennes et tout recours à celle-ci est illusoire », a regretté Nicholas Howen, Secrétaire général de la CIJ.

Dans une ambiance survoltée, les avocats, observateurs internationaux et diplomates venus en nombre assister au procès ont eu des difficultés à franchir les barrages policiers à l’entrée de la Cour d’appel. Des représentants des forces de l’ordre se trouvaient également à l’intérieur de l’édifice.

La salle d’audience était par ailleurs largement occupée par des fonctionnaires de l’Etat, ce qui a permis à la présidente de la Cour d’appel de prétexter le manque de place pour refuser l’accès à la salle d’audience à de nombreux avocats de tunisiens.

Après de multiples suspensions d’audience et l’évacuation, à la demande de la Cour, des représentants diplomatiques présents dans la salle, les deux affaires pour lesquelles Me Abbou était jugé ont été examinées de façon expéditive.

Les avocats observateurs internationaux, également enjoints de quitter la salle d’audience, ont finalement pu assister aux débats suite au tollé général suscité chez leurs confrères tunisiens présents au procès.

La FIDH et la CIJ déplorent le fait qu’avant et pendant les débats, aucun argument juridique n’a été soulevé, renforçant ainsi le climat de non-droit entourant le procès de Me Abbou. En outre, les règles élémentaires de procédure pénale semblent avoir été totalement ignorées par la Cour d’appel de Tunis.

En effet, aucun débat au fond n’a finalement eu lieu et aucun nouveau réquisitoire n’a été prononcé par l’avocat général; par ailleurs il était impossible pour le prévenu de s’exprimer comme il le souhaitait au cours des très brefs débats, l’ordre lui étant intimé de répondre aux questions de la Cour par l’affirmative ou la négative.

La défense de Maître Abbou a justement souligné la violation évidente du droit à un procès juste et équitable par un tribunal compétent, indépendant et impartial établi par la loi en dénonçant particulièrement l’absence de publicité des débats et le non respect des droits de la défense, avant de quitter la salle en refusant de plaider.

Après 3 heures de délibéré, la Cour d’appel de Tunis a confirmé la condamnation de Mohamed Abbou à trois ans et demi de prison. « Cette condamnation sévère de la liberté d’expression conforte nos plus vives préoccupations quant à la capacité ou la volonté des autorités tunisiennes de respecter leurs engagements au regard du droit international à la fois dans le cadre de l’organisation de la participation de la société civile au Sommet mondial de la société de l’information en novembre 2005 et dans la mise en oeuvre de la société de l’information en Tunisie » a déclaré Sidiki Kaba, le président de la FIDH.

Nos organisations réitèrent leur appel aux autorités tunisiennes de respecter la liberté d’expression et dénoncent le caractère arbitraire de la détention de Me Abbou pour avoir pacifiquement exercé ce droit.

Nos organisations demandent en conséquence la libération immédiate de Me Abbou dans l’affaire relative à l’exercice de la liberté d’expression et le droit de Me Abbou de bénéficier d’un nouveau jugement respectueux du droit à un procès équitable par un tribunal compétent, indépendant et impartial, y compris les droits de la défense.

Rappel : La FIDH et la CIJ rappellent que Me Abbou incarcéré depuis le 1er mars 2005, avait été condamné le 28 avril 2005 à une peine de trois ans et six mois de prison ferme par la 4ème Chambre correctionnelle du tribunal de première instance de Tunis dans le cadre de deux affaires jugées le même jour.

La première affaire portait sur la “publication d’écrits de nature à troubler l’ordre public” et sur la “diffamation d’instances judiciaires” suite à la publication d’un article en août 2004 dans lequel Mohammed Abbou comparaît les conditions de détention dans les prisons tunisiennes à celles dans la prison d’Abou Ghraib en Irak.

La deuxième affaire avait été ajoutée une semaine avant le procès et est relative à une plainte pour violences déposée par une avocate en juin 2002, suite à une altercation entre celle-ci et Mohammed Abbou. Cette affaire intervient dans un climat délétère à l’encontre des avocats tunisiens.

Depuis le mois de mars 2005, la multiplication des attaques contre les avocats et les tentatives d’interférences dans le fonctionnement du barreau tunisien sont des plus préoccupantes et portent gravement préjudice au bon fonctionnement de la justice, laquelle repose sur l’existence d’une magistrature et d’un barreau indépendants.

Tunisia-confirmation trial Abbou-press release-2005 (full text in French, PDF)

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